Un commentaire vivant de Fatima - Lucie : « A travers le Cœur Immaculé de Marie »

Source: FSSPX Actualités

En préparation du pèlerinage de la Fraternité Saint-Pie X à Fatima, FSSPX Actualités vous propose un extrait du livre Fatima, Lumière du ciel pour les derniers temps écrit par l'abbé Karl Stehlin. La vie des témoins des apparitions demeure un exemple pour chacun de nous.

La longue vie de Lucie fut entièrement consacrée à faire connaître le message de Fatima. Elle fut choisie pour être le principal témoin de Notre-Dame dans le monde entier et dans ce but elle reçut de la Vierge des vertus particulières. Il est important de considérer les qualités de Lucie et de voir comment sa vie devint une révélation vivante du Message de Fatima. Puisque Lucie devait vivre presque un siècle entier comme religieuse et messagère du Cœur Immaculé de Marie pour le monde, sa vie fut différente de celle de ses cousins. Rappelons d’abord quelques événements et quelques témoignages, ensuite nous verrons trois aspects de la spiritualité de Fatima que nous devons mettre en pratique pour être fidèles au Cœur Immaculé de Marie.

Dès le commencement des apparitions, Lucie fut celle qui souffrit le plus. Tout le monde croit que le privilège d’une telle intimité avec Notre-Dame transforme la vie du voyant en une joie constante et en un bonheur infini. Pour Lucie, ce fut le contraire. Les apparitions devinrent une source de souffrances continuelles, et les humiliations qu’elle endura vinrent de ceux qu’elle aimait le plus : sa propre famille, et ses anciennes amies qui, pour la plupart, suivirent l’avis négatif du curé de la paroisse. Après les apparitions, elle eut à subir de nombreux « interrogatoires ». Sa plus grande souffrance fut d’être fréquemment accusée de mentir : « Alors que certains m’admiraient et me considéraient comme une sainte, il y en avait toujours d’autres qui me maltraitaient et me traitaient d’hypocrite, de visionnaire et de sorcière. C’était le plan de Dieu de mettre ainsi du sel dans l’eau pour qu’elle ne devînt mauvaise. Merci à la divine Providence ! J’ai été dans le feu sans être brûlée et sans être rongée par le petit ver de la vanité qui a l’habitude de gâter toute chose. Ils se sont tous trompés. Je ne suis pas une sainte, comme certains le disent et je ne suis pas une menteuse comme disent les autres. Seul Dieu sait qui je suis ». A la fin du premier interrogatoire pour le procès de canonisation, on lui posa une dernière question : « Êtes-vous certaine que la Vierge Marie vous soit réellement apparue ? » Elle répondit par cette ferme et solennelle déclaration : « J’ai la certitude que je l’ai vue et que je ne me suis pas trompée. Même si l’on me tuait, personne ne pourrait me faire dire le contraire ».

En juin 1921, Lucie quitta définitivement Fatima pour le collège, et ensuite pour entrer dans la vie religieuse. En arrivant au collège, elle fut présentée aux autres sous un nouveau nom et elle fut obligée « de ne jamais dire quoi que ce soit ayant trait à Fatima ». Pendant quatre ans, jour après jour, elle dut porter cette lourde croix du secret dans l’obéissance.

Il lui fut facile de conserver le silence sur ce qui la concernait elle-même, mais ne pas parler de Fatima fut pour elle un pesant fardeau Elle connut une autre épreuve aussi : elle ne savait rien de ce qui se passait à la maison dont elle était maintenant totalement séparée.

Cependant, dans ses lettres à sa famille, son âme reste simple, courageuse, humble, modeste et reconnaissante. Les expressions de gratitude pour l’éducation qu’elle reçoit et le bon exemple de ses supérieurs sont fréquentes. Le Chanoine Barthas note qu’elle n’était pas sans imperfections, mais si elle réalisait qu’elle avait blessé quelqu’un, elle demandait immédiatement pardon avec douceur.

Son calme et son équilibre étaient remarquables car elle conservait toujours une paix inaltérable. Elle n’avait rien de névrotique, de nerveux ou de sentimental. Un de ses directeurs déclara : « Je ne l’ai vue pleurer qu’une fois et c’était quand elle pensait à sa maison natale ».

En 1923, quand elle entra dans l’association des Filles de Marie, elle reçut une grâce extraordinaire : « Après six ans d’épreuves, le 26 août 1923, Notre-Dame revint me rendre visite. J’entrai alors chez les Filles de Marie. Elle me dit qu’Elle était devenue ma vraie Mère du ciel à partir du jour où j’avais quitté ma mère de la terre par amour pour Elle. Une fois encore, elle me recommanda de prier et de me sacrifier pour les pécheurs, disant qu’un grand nombre sont damnés parce que personne ne prie et ne se sacrifie pour eux ». Jamais Lucie ne dit qu’elle était une des voyantes de Fatima, mais elle ne put cacher sa tendre dévotion à sa Mère du Ciel. Sa supérieure écrivait : « En plusieurs occasions, les sœurs vinrent me raconter qu’elle (Lucie) avait quelque chose d’extraordinaire avec Notre-Dame. Quand elle parle d’Elle, Lucie était toujours différente ! Elles remarquèrent aussi qu’elle avait un amour extraordinaire pour la Très Sainte Vierge ».

En octobre 1925, elle entra dans la Congrégation des Sœurs Dorothées, où elle continua sa vie dans la simplicité et la parfaite obéissance. Jusqu’en 1929, la majorité de ses compagnes était encore ignorantes de sa véritable identité. Ses devoirs quotidiens étaient simples et sa spiritualité était de mettre en pratique le message de Notre-Dame, de vivre parfaitement sa règle religieuse et de se donner totalement aux Saints Cœurs de Jésus et de Marie. Patiemment et fidèlement, elle fit connaître à ses supérieurs et à ses directeurs spirituels les révélations reçues pendant ce temps. Le refus général d’accepter et d’accomplir les demandes de Notre-Dame était ce qui la faisait le plus souffrir. Mais le zèle de ceux qui propageaient la dévotion au Cœur Immaculé et qui travaillaient à la consécration de la Russie la comblait de joie et de gratitude.

Le commentaire des apparitions et des révélations présenté maintenant concerne la vie intérieure de Sœur Lucie et l’impact spirituel qu’ont provoqué les souffrances engendrées par sa mission.

Elle entretenait une correspondance abondante et recevait la visite de grandes personnalités et de nombreux prêtres. Cependant, malgré la méfiance ou les refus, au milieu de toutes ces immenses souffrances, elle continua toujours sa mission avec fidélité et constance, et elle révéla les requêtes et les messages du Ciel aux ministres du Seigneur, même lorsque ces messages prédisaient les plus grandes menaces et les plus atroces calamités. Prier et se sacrifier elle-même à ces intentions furent la règle de toute sa vie.

Quand le corps de Jacinthe fut transféré au cimetière de Fatima en 1935, l’Évêque du lieu ordonna à Sœur Lucie d’écrire la biographie de Jacinthe. Sa réponse révèle le degré de sa vie spirituelle. Elle déclara fermement qu’elle écrivait « seulement et exclusivement pour la gloire de Jésus et de la Bienheureuse Vierge Marie » et, plus loin : « Je vais maintenant commencer ce travail malgré les répugnances que je ressens puisque je ne puis dire presque rien de Jacinthe sans parler directement ou indirectement de ma pauvre personne. J’obéis néanmoins à la volonté de Votre Excellence qui est pour moi l’expression de la volonté de Dieu. Ensuite, je commence par demander aux très Saints Cœur de Jésus et Marie de daigner bénir cette tâche et de rendre utile cet acte d’obéissance pour obtenir la conversion des pauvres pécheurs pour lesquels Jacinthe s’est si généreusement sacrifiée elle-même ». Elle fit la même déclaration pour tous ses autres mémoires et écrits publics ; elle n’a jamais écrit quoique ce soit de sa propre initiative, mais toujours et seulement selon l’ordre exprès de l’Évêque. Elle eut toujours une extrême répugnance à écrire, spécialement lorsqu’elle dut écrire les secrets. Quand elle en reçut l’ordre pour le troisième secret, elle tomba même dans une étrange et mystérieuse maladie.

Sœur Lucie fut toujours une humble religieuse. En 1948, elle obtint l’indult papal d’entrer dans l’Ordre du Carmel et le témoignage des sœurs fut unanime durant toute sa vie : « Elle était vraiment gaie et simple. Sa conduite était toujours digne et réservée ; elle répondait sans cesse avec affabilité à ceux qu’elle recevait », témoigne la Supérieure de Tuy. Chez les prêtres qui la connaissaient bien, tous étaient unanimes à dire qu’elle n’avait rien d’extraordinaire, ni dans son apparence, ni dans son langage, ni dans ses expressions. Elle était toujours modérée et équilibrée « Elle n’aimait pas parler des apparitions ». « Quand elle y était obligée, elle le faisait avec naturel et modestie, mais avec assurance... elle était douée d’une très fidèle, rapide et extraordinaire mémoire... Elle montrait une grande docilité aux ordres de ses supérieurs dans lesquels elle reconnaissait la divine autorité » (Chanoine Galamba).

Dans toutes ses tribulations, ses humiliations et ses constantes souffrances, son refuge était toujours le Cœur Immaculé : « Le Cœur Immaculé de Marie est mon refuge spécialement dans les moments les plus dificiles. Là, je suis toujours en sécurité. C’est le Cœur de la meilleure des mères ; il est toujours attentif et veille sur le plus petit de ses enfants. Comme cela m’encourage et me fortifie ! Je trouve en Elle ma force et ma consolation. Le Cœur Immaculé est le canal par lequel Dieu envoie une multitude de grâces qu’il répand dans mon âme. Aidez-moi à Lui être reconnaissante et à correspondre à une si grande miséricorde... Notre-Seigneur me dit il y a quelques jours :

« Je désire ardemment la propagation du culte et de la dévotion au Cœur Immaculé de Marie, parce que ce Cœur est l’aimant qui attire les âmes à Moi, le feu qui produit les rayons éclatants de ma Lumière et de mon Amour sur terre, la source intarissable qui fait jaillir sur le monde l’eau vive de ma Miséricorde ».

« ... Ne pensez pas que je sois triste de ne pas pouvoir aller là-bas. J’offre ce sacrifice avec plaisir parce qu’avec le Cœur Immaculé de Marie, nous sauvons beaucoup d’âmes et je me rappelle toujours cette grande promesse avec joie : « Je ne vous laisserai jamais seule. Mon Cœur Immaculé sera votre refuge et le chemin qui vous conduira à Dieu ». Je crois que cette promesse n’est pas seulement pour moi mais aussi pour toutes les âmes qui souhaitent trouver un refuge dans le Cœur de leur Mère du Ciel et être conduites dans le chemin qu’Elle nous a tracé. Il me semble que telles sont aussi les intentions du Cœur Immaculé de Marie : faire briller devant les âmes ce rayon de lumière, leur montrer encore ce port du salut, toujours prêt à accueillir tous les naufragés de ce monde... » On peut dire que sa vie fut une application vivante du grand moyen donné par le Ciel pour procurer le « salut des derniers temps » : le Cœur Immaculé de Marie.

La vie de Sœur Lucie au Carmel consista en une immolation et une souffrance spirituelle continuelles. Avant 1950, on peut trouver dans ses lettres quelques déclarations telles que : « Je suis peinée de ce que la consécration de la Russie ne soit pas faite comme l’a demandée Notre-Dame ». En 1955, Sœur Lucie fut réduite au silence, et personne ne pouvait la rencontrer et parler avec elle sans une permission expresse du Saint-Siège. Aussi longtemps qu’elle le put, elle a parlé et écrit aux sujets des tribulations à venir. Et bien qu’il ne lui fût pas permis de révéler le troisième secret, Sœur Lucie voyait que les prophéties annoncées se réalisaient sous ses yeux. Même si les désastreuses réalités du Concile Vatican II et ses réformes lui furent dissimulées, elle put sentir, à travers les visites de ses proches (parmi lesquels se trouvaient des prêtres), « la vague diabolique se déverser sur le monde entier », et plusieurs fois, elle parla de la « dernière et décisive bataille entre le diable et Notre-Dame », de la stratégie du démon « pour vaincre les âmes consacrées à Dieu ». Sachant que la hiérarchie de l’Eglise se refusait à accomplir les requêtes de Notre-Dame, elle dit : « N’attendons pas que vienne de Rome un appel à la pénitence de la part du Saint-Père pour le monde entier ; n’attendons pas non plus qu’il vienne de nos Evêques dans leur diocèse, ni des congrégations religieuses ». Elle ne prédit pas seulement les châtiments, mais elle donna aussi un conseil important pour surmonter les calamités futures :

« Maintenant, chacun de nous doit commencer sa propre réforme spirituelle. Chacun doit non seulement sauver son âme, mais aussi toutes les âmes que Dieu a placées sur son chemin ».

Avant d’être réduite au silence absolu en 1974, Sœur Lucie avait la permission d’écrire un certain nombre de lettres. L’ensemble de ces lettres parle de la crise de l’Église et d’une désorientation diabolique. Elle exhorte ses correspondants à la fidélité et à la vigilance contre le pouvoir démoniaque qui est à l'œuvre dans le monde, et qui est la cause de la perte de la foi pour beaucoup. Pour rester fidèle, il est nécessaire de se souvenir des requêtes de Notre-Dame à Fatima : prier et faire des sacrifices pour la conversion des pauvres pécheurs, continuer fidèlement la récitation du Rosaire quotidien, persévérer dans la dévotion au Cœur Immaculé et accomplir des actes de pénitence. Ceci devrait être la vie et l’immolation cachées de Sœur Lucie jusqu’à sa mort.

Extrait de Fatima, Lumière du ciel pour les derniers temps, par l'abbé Karl Stehlin FSSPX 

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