Un nouveau site pour présenter les cardinaux

Dans un récent article, ce site parlait de cardinaux « inconsistants » nommés lors du dernier consistoire du 7 décembre 2024, citant le journaliste d’origine chilienne Luis Badilla, qui parlait de « liste plate » (flat list), « c’est-à-dire de clercs, à quelques exceptions ponctuelles près, de profil faible ».
Prolongeant son analyse, il soulignait que la liste des 163 cardinaux créés par François révélait « un manque de grandes figures, avec une lumière propre, – des pasteurs, bien sûr, mais aussi des intellectuels puissants, avec un arrière-plan philosophique, théologique et canonique convaincant et reconnu ».
Et il montrait le danger que représente un collège cardinalice aussi falot, lors d’un conclave chargé d’élire le prochain pape. Si beaucoup d’entre eux sont médiocres, quelques-uns sont habiles et sauront influencer les hésitants : ce sont les cardinaux « faiseurs de rois » dont le rôle peut être décisif.
Il concluait enfin qu’un conclave « avec de nombreuses figures mineures, comme c’est le cas aujourd’hui, pourrait permettre d’assurer le contrôle de la situation. Le risque est donc grand qu’à la fin, dans la chapelle Sixtine, ce soient trois ou quatre cardinaux “faiseurs de rois” qui décident, en pesant sur le résultat final, en particulier avec les indécis, les perplexes et les opposants. »
Un collège cardinalice en grave difficulté
C’est la même idée qu’illustre Sandro Magister dans un article du 23 décembre dernier, estimant que François « a gravement porté préjudice à la capacité des cardinaux d’agir en tant que “collège” », en limitant les occasions pour les cardinaux de se connaître. Il estime que c’est à cause de la déception éprouvée lors du consistoire de février de 2014, qui a précédé le synode sur la famille.
Le pape François pensait avoir tout réglé pour assouplir l’interdiction de la communion aux divorcés-remariés. Le consistoire était tenu à huis clos et le discours d’ouverture confié au cardinal Walter Kasper, fervent défenseur de cet assouplissement, qui prêcha en sa faveur. Il avait même reçu – et lui seul – l’autorisation d’enfreindre le secret du consistoire, ce dont il ne se priva pas. Son rapport fut publié dans le journal italien Il Foglio le 1er mars, et aux éditions Queriniana.
Au consistoire, le discours du cardinal Kasper fut critiqué par un très grand nombre de cardinaux, et des plus influents. Et malgré une nouvelle tentative du Pape, qui approuva le rapport de Kasper devant l’assemblée, dès la première intervention du lendemain, la critique repartit de plus belle.
Pour lutter contre les thèses de Kasper, la Congrégation pour la doctrine de la foi présidée par le cardinal Gerhard Müller, avait prévu de publier dans L’Osservatore Romano une tribune de tendance opposée rédigée par un cardinal de premier plan. Le Pape mit son veto à la publication de ce texte.
Ce qui n’empêcha pas une douzaine de cardinaux éminents d’intervenir pour défendre la doctrine et la pratique de toujours, contre la communion aux divorcés-remariés. Parmi eux, « les Allemands Müller et Walter Brandmüller, les Italiens Carlo Caffarra, Angelo Scola et Camillo Ruini, les Canadiens Marc Ouellet et Thomas Collins, l’Américain Raymond L. Burke et l’Australien George Pell ».
Certains d’entre eux signèrent en octobre 2015, la Lettre au Pape “des treize cardinaux” pour protester contre l’approche donnée à la deuxième session du synode sur la famille. Trois d’entre eux, ainsi que l’archevêque de Cologne, Joachim Meisner, ont déposé leurs dubia à la fin du synode, faisant éclater leurs protestations au grand jour après n’avoir reçu pour toute réponse que le silence.
Après ce consistoire de 2014, « François a renoncé à convoquer tout consistoire digne de ce nom, à l’exception de ceux purement protocolaires organisés pour la nomination de nouveaux cardinaux », remarque Sandro Magister. Mais jusqu’en 2016, le Collège des cardinaux faisait preuve de vitalité, avec des personnages dont la renommée s’étendait bien au-delà du cercle restreint des spécialistes.
Avec le temps, ils ont atteint la limite des 80 ans qui ne permet plus de participer au conclave. Et les nouveaux cardinaux sont, pour la plupart d’entre eux, d’illustres inconnus, même des autres cardinaux. La raison tient dans la décision de François de promouvoir des ecclésiastiques issus des « périphéries » de l’Eglise. De plus, le pape à réduit les possibilités de faire connaissance entre eux.
Des profils biographiques depuis le XVIIIe siècle
Sandro Magister note que le cardinal Brandmüller, président de 1998 à 2009 du Comité pontifical pour les sciences historiques, « avait rappelé qu’à partir du XVIIIe siècle, on avait commencé à rédiger des profils biographiques détaillés de chaque cardinal, afin de les distribuer aux électeurs à la veille des conclaves ». Ce besoin est toujours d’actualité.
Mais il n’est pas facile de réunir des informations détaillées sur tous les cardinaux. Le site du Saint-Siège est assez avare en informations dans la notice qu’il consacre à chacun d’eux.
Il existait déjà un site et une revue destinés aux cardinaux – et à tous ceux qui sont intéressés par le collège cardinalice – tenus par un groupe de vaticanistes : Cardinalis. Traduit en anglais, italien, français et espagnol afin que chaque cardinal puisse le lire sans difficulté, le magazine est envoyé directement à l’adresse personnelle de tous les cardinaux.
Un nouveau site vient de voir le jour, en langue anglaise pour le moment : Cardinalium Collegii Recensio, détaillant les profils approfondis et détaillés de chaque cardinal. Il est l’œuvre de deux vaticanistes : Diane Montagna et Edward Pentin. L’initiative est soutenue par le Sophia Institute Press et la revue Cardinalis, susmentionnée.
Le nouveau site décrit avec précision comment chaque cardinal a exercé ses devoirs d’évêque. Il informe sur la façon dont il se positionne sur les questions les plus controversées aujourd’hui : de la bénédiction des couples homosexuels aux femmes diacres en passant par la communion aux divorcés remariés et l’accord entre le Saint-Siège et la Chine.
Les profils de plusieurs dizaines de cardinaux, à commencer par les papabili, sont complets, et pour les autres, les éléments essentiels sont en ligne, et constamment mis à jour. Une histoire du cardinalat et le fonctionnement d’un conclave viennent compléter les informations.
Article lié :
(Sources : diakonos.be/Cardinalium Collegii recension – FSSPX.Actualités)
Illustration : The College of Cardinals Report