Amérique latine : inexorable déclin de l’Eglise catholique

L’étude, parue en 2023, se compose de deux parties : une première partie avec une analyse comparative de la situation actuelle dans les régions où l’Eglise est répartie – Amérique centrale et Mexique (Camex), Caraïbes et Antilles, région bolivarienne ou andine et Cône Sud. La deuxième partie présente l’évolution de la mission de l’Eglise dans la région pour la période 1970-2020.

Les données de ce travail proviennent des Annuaires statistiques de l’Eglise, source d’informations publiée annuellement par le Vatican. Elles sont en outre complétées par les données du Latinobarómetro, qui fournit des informations sur l’auto-déclaration d’appartenance au catholicisme de la population.

Dans le prologue, Mgr Jorge Eduardo Lozano, secrétaire général du CELAM et archevêque de San Juan de Cuyo (Argentine), écrit : « La diminution du nombre de baptêmes et d’autres sacrements, tels que les confirmations et les mariages, soulève des questions sur la sacramentalité dans les pays d’Amérique latine.

« L’Eglise doit prendre en compte les réalités culturelles et sociales changeantes de l’Amérique latine et des Caraïbes. » Le rapport indique que le nombre de baptêmes annuels est passé de 8 197 000 en 2000 à 5 135 000 en 2020. Les confirmations et les mariages catholiques ont également diminué de façon constante au cours de la même période.

Dans la conclusion de l’étude, les auteurs avancent de façon purement sociologique : « Il est possible de conjecturer que le nombre de catholiques dans la région, envisagé sur la base du nombre de baptêmes administrés par an, diminuera dans un avenir proche en raison de la conjonction de deux tendances : le ralentissement de la croissance démographique et la baisse du nombre de baptêmes administrés annuellement. »

Un affaiblissement généralisé de l’affiliation catholique semble « indiquer une perte d’influence de l’Eglise catholique dans la population latino-américaine, une distanciation par rapport à l’institution ».

Mgr Lozano souligne que « la diminution du nombre de séminaristes pose des défis pour l’avenir en ce qui concerne le nombre de prêtres et le soin pastoral des communautés. (…) La vie consacrée, tant masculine que féminine, a été un pilier important de l’Eglise en Amérique latine, assurant une présence missionnaire constante et un service social précieux à travers ses œuvres.

« Cependant, la vie religieuse féminine a diminué, ce qui soulève des questions quant à l’avenir de ces œuvres et aux conséquences sur les communautés les plus vulnérables. »

Ce que le rapport du CELAM ne dit pas

Une étude réalisée par le Pew Research Center, intitulée Religion en Amérique latine - Changement généralisé dans une région historiquement catholique, et publiée le 13 novembre 2014, révélait que l’Eglise catholique a commencé à décliner de façon significative depuis les années 70, tandis que progressaient dans le même temps les évangéliques et les “sans religion”. [Voir DICI n°307 du 19/12/2014]

Il y a déjà 10 ans, l’Eglise catholique connaissait des pertes nettes. Ainsi en 2014 beaucoup de Latino-Américains ont rejoint les confessions protestantes évangéliques ou rejeté la religion catholique. Près d’un Nicaraguayen sur quatre, un Brésilien sur cinq et un Vénézuélien sur sept sont d’anciens catholiques. Près d’un Latino-Américain sur dix affirme avoir été élevé dans la religion protestante.

Et si près de 4% des Latino-Américains disent avoir été élevés sans religion, 8% affirment n’avoir aucun lien avec une quelconque religion. Une grande partie des migrations du catholicisme vers le protestantisme en Amérique latine a eu lieu en l’espace d’une seule vie.

Les ex-catholiques convertis au protestantisme ont répondu aux questions sur les motifs de leur changement. Les raisons les plus fréquemment citées ont été la nécessité d’une relation plus personnelle avec Dieu et un style de culte différent. En ce qui concerne les questions d’ordre moral comme l’avortement, les relations hors mariage, le divorce et le mariage entre personnes de même sexe, les catholiques latino-américains tendent à être moins conservateurs que les protestants.

Ce qui est considéré comme un autre motif de conversion, sachant que 60% des adultes ont quitté l’Eglise catholique pour rechercher une confession qui place haut les questions de moralité. L’enquête du Pew Research Center montre par ailleurs que, dans presque tous les pays étudiés, les évangéliques disent aller à l’Eglise plus souvent et prier plus fréquemment que les catholiques.

Les pays qui apparaissent les plus catholiques sont le Mexique (81% de catholiques et 9% de protestants) et le Paraguay (89% de catholiques et 7% de protestants). « En Amérique latine les pentecôtistes arrachent des millions de fidèles à l’Eglise catholique. Mais le pape n’a pour eux que des paroles d’amitié. C’est sa façon de pratiquer l’œcuménisme… », commentait le vaticaniste Sandro Magister le 19 novembre 2014.

Lors de la visite de son ami, le pasteur évangélique Giovanni Traettino, à Caserte le 28 juillet 2014, François avait prononcé un discours sur sa vision de l’œcuménisme que le vaticaniste italien présentait comme « une sorte d’Eglise universelle ayant l’aspect d’un polyèdre dont l’Eglise catholique constituerait une des facettes, à égalité avec les autres Eglises et dénominations ».

Et de préciser : « On ne sait pas très bien comment François harmonise cette conception qui est la sienne, avec ce qui a été affirmé par le magistère antérieur de l’Eglise, en matière d’œcuménisme. » – Que dire alors d’une hypothétique continuité avec l’encyclique de Pie XI Mortalium animos (6 janvier 1928) « sur l’unité de la véritable Eglise » ?