IVe assemblée du Chemin synodal : un schisme consommé (2)
Du jeudi 8 au samedi 10 septembre 2022 s’est déroulé à Francfort la quatrième et avant-dernière assemblée du Chemin synodal allemand, qui a été l’occasion de mesurer la détermination d’une partie de l’Eglise d’Allemagne d’aller jusqu’au bout d’un processus qui tend au schisme.
Lors de la première journée, un coup de théâtre s’est produit, avec le rejet du texte sur la morale sexuelle, grâce au refus de 21 évêques ayant voté contre le texte, et représentant une minorité de blocage, comme l’a rapporté le précédent article.
Concert de lamentations
Après le rejet du texte dont les propositions sont toutes plus scandaleuses les unes que les autres, un concert de lamentations s’est élevé le deuxième jour, le vendredi 9 septembre, pour se plaindre de ce refus. Plusieurs évêques ont signifié leur déception.
Ainsi, l’évêque d’Hildesheim, Mgr Heiner Wilmer, a reconnu qu’il s’agit d’un revers pour les projets de réforme de l’Eglise. « J’ai voté en faveur du document de base sur la réforme de la doctrine sexuelle catholique et je suis très contrarié par le fait que la majorité des deux tiers des évêques n’ait pas été atteinte », a-t-il déclaré.
Il partage la déception de nombreux catholiques face à l’échec du texte lors du vote de jeudi soir. La réforme de la doctrine sexuelle de l’Eglise est et reste un sujet essentiel selon lui. « Le rejet du document de base par une minorité d’évêques n’y change rien », poursuit-il, et il assure qu’il continuera à s’engager pour un renouvellement de la morale sexuelle catholique.
Une religieuse bénédictine a été jusqu’à parler d’“auto-excommunication” des évêques concernés ! Ce terme a été fermement rejeté par l’un d’entre eux qui a été soutenu par Mgr Georg Bätzing, président de la Conférence épiscopale allemande (DBK) et co-président du Chemin synodal.
Adoption d’un texte contraire à la doctrine et à la discipline catholiques
Dans la soirée, après bien des perturbations liées au vote négatif, l’assemblée a repris sa marche vers l’abîme. Un document, proposé en deuxième lecture, a été adopté à une large majorité : 92% des délégués et 83% des évêques l’ont approuvé.
Il s’agit d’un texte « d’action », à visée pratique donc. Intitulé « Réévaluation doctrinale de l’homosexualité », il s’appuie sur le texte rejeté la veille, ce qui pose un problème qui a été perçu par certains, mais balayé d’un revers de main par la présidence.
Ne comportant que trois pages, ce texte « recommande au pape de procéder à une précision et à une réévaluation de l’homosexualité sur le plan magistériel ». Il est affirmé que « la sexualité entre personnes du même sexe, incluant des actes sexuels, n’est pas un péché qui sépare de Dieu, et ne doit pas être jugée comme mauvaise en soi ».
Concrètement il est demandé une révision du catéchisme, en particulier, les « actes homosexuels » doivent être retirés de la liste des « principaux péchés contre la chasteté ». De plus, « l’Eglise doit confesser qu’elle a infligé des souffrances à des personnes et porté atteinte à leur dignité par son enseignement et sa pratique en matière d’homosexualité ».
Et puisque « l’homosexualité n’est pas une maladie, les soi-disant “thérapies de conversion” doivent être rejetées ». Et enfin, « aucune personne ne doit être empêchée d’assumer des fonctions ecclésiastiques ou d’être ordonnée prêtre, et aucune personne au service de l’Eglise ne doit subir de désavantages professionnels parce qu’elle est orientée vers l’homosexualité ».
La justification avancée s’appuie sur l’évolution des mentalités et les sciences humaines. « La réévaluation proposée ici de l’homosexualité vécue s’engage sur une voie qui veut jeter des ponts entre la doctrine et la tradition de l’Eglise existantes et un développement ultérieur. »
Modification du règlement de base du service de l’Eglise
En Allemagne, il existe un Règlement de base du service de l’Eglise dans le cadre des relations de travail ecclésiastiques, qui réglemente l’embauche, le traitement et le licenciement du personnel employé par les institutions ecclésiastiques.
Ce règlement prévoit, à côté de dispositions qui concernent la qualité du travail, des mesures fondées sur la vie morale de l’employé. En particulier, il dispose qu’une vie morale déréglée est un motif de licenciement. C’est à abolir ces dispositions que vise le texte adopté en deuxième lecture par l’Assemblée du Chemin synodal, ainsi que par les évêques.
Au nom de la dignité humaine et de l’évolution de l’opinion publique, le règlement ne doit plus permettre « que les décisions en faveur d’une forme légale de partenariat soient considérées comme des violations des obligations de loyauté et empêchent en conséquence un recrutement au service de l’Eglise ou entraînent la fin d’une relation de travail existante ».
De plus, « il convient d’introduire dans le règlement fondamental une clause de non-discrimination interdisant aux employeurs ecclésiastiques de ne pas embaucher une personne en raison de son identité sexuelle ou du choix d’une forme légale de partenariat, ou de licencier un collaborateur ecclésiastique pour ces motifs ».
Enfin, les ordonnances concernant la Missio canonica doivent être modifiées dans le même sens. De même pour les procédures d’octroi du Nihil obstat. Il est toutefois précisé pour ce dernier point que, « en tant que matière relevant de l’Eglise universelle, elles doivent être modifiées en fonction de l’Eglise universelle ».
Autrement dit, le document s’oppose à toute sanction ou discrimination à l’embauche des divorcés remariés ou des couples homosexuels.
Texte de base du IIIe forum sur « les femmes dans les ministères et les fonctions dans l’Eglise »
La deuxième journée s’est clôturée par l’adoption du texte de base du IIIe forum, sur l’égalité des droits des femmes dans l’Eglise. Adopté en deuxième lecture par 92 % des délégués et 82 % des évêques, le texte revendique l’égalité des femmes dans tous les postes de responsabilité et l’accès aux ministères ordonnés.
Il faut remarquer, dans l’introduction, ce passage : « la forme institutionnelle et officielle de l'Eglise doit être façonnée à tout moment », qui s’oppose directement à la constitution divine de l’Eglise.
Le moyen à employer pour y parvenir est donné plus loin : « Pour cela, il est indispensable de réfléchir aux différentes positions théologiques dans la perspective de l'égalité des sexes, d'entrer en contact étroit avec les sciences sociales, culturelles et humaines et de reprendre de manière constructive leurs réflexions sur la théorie du genre. »
Les rédacteurs ont également cherché leur inspiration dans la théologie et la pratique des orthodoxes, ainsi que chez les réformés… sans oublier le fameux synode de Wurtzbourg. Ils contestent la tradition de l’Eglise et mettent en discussion les décisions définitives sur l’exclusion des femmes des ministères ordonnés.
L’Assemblée du Chemin synodal s’est ainsi rassurée : la révolution avance, et le schisme – pour ne pas dire l’hérésie sur certains points – se consolide dans les cœurs et les dispositions pratiques.
A suivre…
(Sources : katholisch.de/InfoCatolica – FSSPX.Actualités)
Illustration : capture d’écran Facebook/Der synodale Weg