Les 50 ans de la nouvelle messe : la mise en place du Consilium 

Source: FSSPX Actualités

La constitution sur la liturgie du concile Vatican II, Sacrosanctum concilium, ayant été approuvée le 4 décembre 1963, il restait à la mettre en œuvre. Après quelques tâtonnements, le pape Paul VI confia cette tâche à une commission créée ad hoc : le Consilium

Au cours de l’audience du 10 octobre 1963, le pape Paul VI avait exprimé devant les modérateurs du Concile – les cardinaux Léon-Joseph Suenens, Giacomo Lercaro, Julius Döpfner et Grégoire Agagianian –, son désir de voir les premières directives pour l’application de la Constitution sur la liturgie publiées dès la promulgation de la constitution. Il demanda au cardinal Lercaro de lui préparer un projet. 

Ce dernier travailla avec Mgr Annibale Bugnini, qui se trouva ainsi réhabilité. Le 21 novembre, ils remirent au pape un projet de motu proprio et une instruction qu’ils avaient préparés avec l’aide d’experts. Mais l’affaire n’aboutit pas. 

Un mise en place confuse 

Comme souvent, Paul VI hésitait dans la marche à suivre. Au mois de décembre 1963, il confia au P. Ferdinando Antonelli, secrétaire de la Commission conciliaire sur la liturgie, le soin de préparer un plan général de révision des livres liturgiques. Le P. Antonelli travailla avec le cardinal Arcadio Larraona, préfet de la Congrégation des rites. Parallèlement, le 3 janvier 1964, le cardinal Amleto Cicognani chargeait le P. Bugnini, au nom de Paul VI, d’organiser une commission pour la mise en œuvre de la Constitution conciliaire sur la liturgie. Le P. Bugnini travailla avec le cardinal Lercaro. 

Le 13 janvier 1964, la Secrétairerie d’Etat annonçait la création du Consilium ad exsequendam Constitutionem de Sacra Liturgia, le Conseil pour l’application de la Constitution sur la sacrée liturgie. Il ne comportait encore que trois cardinaux, dont Lercaro et Larraona, et un secrétaire, le P. Bugnini. Une rivalité entre ce Conseil et la Congrégation des rites se profilait. Cette dernière se considérait comme seule compétente pour la réforme. Mais ni le cardinal Lercaro, ni le P. Bugnini ne voulaient être soumis à la Congrégation des rites. 

Paul VI trancha en faveur du Consilium. Ses membres étaient plus déterminés, et le pape craignait le conservatisme du cardinal Larraona. Le 29 février 1964, le Consilium fut doté d’un statut juridique. Il était exempté de la tutelle de la Congrégation des rites, qui se voyait ainsi dépossédée de ses attributions. Yves Chiron en fait la remarque : « Comme l’a souligné Piero Marini, qui fut un des collaborateurs de Bugnini au Consilium : “Le Consilium finalement, à la différence des dicastères de la Curie romaine, n’était pas lié par des habitudes de procédure ou par quelque règlement particulier” 1  ». Il ne relevait en dernier ressort que du pape seul. 

Le cardinal Larraona s’en inquiétait. Le P. Antonelli rapporte ses propos datés du 16 mars 1964 : « Nous sommes très affligés par le fait que le Consilium s’est approprié un certain nombre de fonctions qui logiquement appartiennent à la Congrégation des rites : le Consilium est un organe d’étude, la congrégation un organe de gouvernement ». Mais il se trompait. Le Consilium sera traité à égalité avec la congrégation. 

La composition du Consilium 

Le P. Bugnini se retrouvait dans son élément. Il avait espéré une telle position et avait œuvré en ce sens. Dans une note écrite en octobre 1963, il décrivait déjà la structure que devrait posséder la commission post-conciliaire chargée de la mise en place de la réforme. Elle devrait être « autonome, dynamique et internationale ». 

Autonome comme les commissions préparatoires. Dynamique afin de pouvoir travailler rapidement, sans aucun fonctionnaire de la Curie parmi ses membres. Internationale, pour réunir les experts que le P. Bugnini connaissait pour avoir travaillé avec eux, ou ceux s’étant illustrés au Concile. 

Le 5 mars 1964, l’Osservatore romano publia la liste agréé par Paul VI : « La plupart de ses membres étaient des évêques résidentiels (des “évêques de terrain” et non des prélats du Vatican) et le nouvel organisme avait un caractère international hautement revendiqué : “42 membres représentant 26 pays de tous les continents” 2  ». Une telle composition ne permettra de réunir tous les membres à Rome que rarement. A ceux-ci s’ajoutaient les consulteurs, qui se retrouvèrent plus nombreux que les membres lors des sessions plénières. 

Le nombre des membres augmentera jusqu’à atteindre 51. Mais les consulteurs atteignirent un chiffre pléthorique, bien plus qu’aucun autre dicastère de la Curie. Bugnini dresse une liste de 149 consulteurs nommés officiellement, parmi lesquels se trouvent les ténors du Mouvement liturgique. S’y ajoutent encore 74 autres consulteurs. 

C’est de cette officine du Consilium, sous l’impulsion continuelle de son secrétaire, que devait sortir la réforme liturgique : nouvelle messe, concélébration, communion sous les deux espèces, nouveaux rituels de tous les sacrements, réforme du bréviaire, suppression des ordres mineurs, communion dans la main… Une véritable tornade qui n’épargna rien. Le Consilium a été le bras armé de la révolution liturgique voulue par Paul VI et pilotée par Bugnini. 

  • 1 Yves Chiron, Annibale Bugnini, DDB, 2016, p. 116.
  • 2 Ibidem, p. 117.