Abus dans l’Eglise : un cardinal tire les leçons de l’histoire

Source: FSSPX Actualités

Cardinal Walter Brandmüller.

L’état moral du clergé est critique, et la situation est « comparable à celle des XIe et XIIe siècle, explique dans le numéro de novembre 2018 du mensuel allemand Vatican Magazin, le cardinal Walter Brandmüller, historien réputé et co-signataire en 2016 des Dubia en réponse à Amoris Laetitia. 

Ce constat ne fait aucun doute pour le cardinal lorsqu’il voit l’Eglise d’aujourd’hui « ébranlée jusque dans ses fondations », par la révélation des cas d’abus sexuels et d’homosexualité qui apparaissent « de façon presque épidémique au sein du clergé et jusque dans la hiérarchie ». 

Pour expliquer cette décadence, il faut se tourner vers les siècles passés lorsque la papauté elle-même était devenue une telle source de richesses que « l’on combattait et l’on marchandait pour se l’approprier », explique Mgr Brandmüller. 

Il s’ensuit que des personnes « moralement dissolues, davantage attachées au patrimoine qu’au soin des âmes » et fort peu enclines à mener une vie vertueuse et chaste « ont pris la place des pasteurs », déplore le cardinal. 

Mutatis mutandis, la situation actuelle présente de sérieuses analogies avec le passé, sauf qu’aujourd’hui, estime le cardinal, Rome a trop tardé à réagir. L’autorité suprême a en particulier laisser publier et enseigner dans les universités pontificales des auteurs sulfureux ou carrément hérétiques. 

Des causes de la décadence 

Sans doute, nuance-t-il, « certains livres sur la morale sexuelle ont été condamnés » et, même, « la licence d'enseignement de deux professeurs a été révoquée, en 1972 et 1986 ». « Mais, poursuivit le cardinal, « des hérétiques vraiment importants, comme le jésuite Josef Fuchs, qui a enseigné de 1954 à 1982 à l'Université pontificale grégorienne, et Bernhard Häring, qui a enseigné à l'Institut rédemptoriste de Rome, ainsi que le moraliste très influent de Bonn, Franz Böckle, ou de Tübingen, Alfons Auer, ont pu répandre sans entrave le germe de l'erreur, à la face de Rome et des évêques. Avec le recul, l’attitude de la Congrégation pour la doctrine de la foi en la matière est tout bonnement incompréhensible. On a vu venir le loup et on s’est contenté de le regarder pendant qu’il déchirait le troupeau », explique le cardinal Breandmüller. 

Le cardinal en est persuadé, si un sursaut est encore possible, il doit venir de celui qui a reçu le pouvoir des clefs : « plus les fidèles se sentiront soutenus par la volonté active de la hiérarchie, du pape jusqu’en bas, de renouveler et de raviver l’Eglise, plus un véritable nettoyage aura des chances d’aboutir », estime-t-il. 

Ajoutons que la décadence morale n’est pas le seul fait de l’influence - réelle - de ce monde pour lequel le Seigneur n’a pas prié parce que Satan en est le prince. Elle résulte aussi de la déformation des esprits, du mariage impossible entre le vrai et le faux, le bien et le mal. Elle est la conséquence du laxisme en moral, de l’insuffisance du catéchisme moderne et d’une prédication anémiée. Le peuple chrétien a fini par perdre le sens du beau, du vrai et du bien, et donc l’horreur du péché, du vice et de l’erreur. A l’origine de cet état de fait il faut bien remonter à la crise de la foi dans l’Eglise, depuis au moins cinquante ans. Les réformes engagées au nom du concile Vatican II n’y sont pas étrangères, loin s’en faut.