L’eugénisme hier et aujourd’hui (1) : introduction et définitions

Source: FSSPX Actualités

Depuis de nombreuses années, la mentalité eugénique gagne du terrain partout dans le monde. Les débats concernant la procréation médicalement assistée sont actuels, ainsi que toutes sortes de pratiques médicales permises par les progrès techniques et les innovations technologiques. FSSPX.Actualités vous propose une série d’articles pour faire le point sur l’eugénisme. 

Ce qui se cache derrière le terme d’eugénisme est souvent mal connu. Généralement il est employé à propos d’une période limitée de l’histoire, comme pour se persuader que rien ne justifie d’aborder ce problème aujourd’hui. Cependant les pratiques eugénistes, dans le sens le plus péjoratif du mot, sont aujourd’hui bien présentes et se répandent insidieusement, sous des prétextes d’humanité et de liberté. À tel point que des personnalités pourtant fort éloignées de la morale, voire étrangères à toute morale, s’inquiètent et tirent le signal d’alarme. 

Il se trouve même des hommes d’Eglise, de différentes façons et à divers degrés, pour développer des arguments en faveur de l’eugénisme ou pour le justifier dans certains cas. C’est l’un des chapitres douloureux de la crise que l’Eglise connaît depuis plus d’un demi-siècle. 

Quelques définitions 

Le mot “eugénique” est d’apparition récente. D’après le Dictionnaire Historique de la Langue Française, c’est « un emprunt (1883) à l’anglais eugenics (1883, en même temps que eugenic, adj.), composé par F. Galton (1822-1911), disciple de Darwin, à partir du grec eu- “bien” et genos “naissance”, “race”, qui se rattache à la racine indo-européenne °gen(e)-, °gne- “engendrer” et “naître”. 

« Le mot désigne la discipline qui étudie les méthodes susceptibles d’améliorer les caractères propres des populations humaines, et l’adjectif ce qui concerne ou applique cette discipline. (…) 

« De même sens, EUGÉNIE n. f. (1930) est vieilli. EUGÉNISME n. m. (1907-1908), emprunt à l’anglais eugenism (1887), est didactique, comme EUGÉNISTE n. (1935) et adj. (1941), emprunté à l’anglais eugenist (n., 1908 ; adj., 1921) ; ces termes restent marqués par leur époque et par l’emploi ultérieur relatif à la politique des régimes racistes et dictatoriaux 1 ». 

Le Larousse quant à lui donne cette définition : « étude théorique et pratique de tous les moyens capables de protéger, d’accroître et de perfectionner les éléments les plus robustes et les mieux doués des races humaines, c’est-à-dire de sauvegarder la qualité génétique des générations futures 2 ». 

Le mot recouvre donc l’ensemble des sciences et des méthodes qui recherchent le progrès de la race humaine, et il est parfois employé dans ce sens très général. Mais dans un sens plus restreint, il s’agit surtout de traiter des problèmes de population : 

« 1) problèmes intéressant la quantité de la population (mesures positives favorables à l’accroissement du nombre, depuis l’interdiction de l’avortement et de la propagande néomalthusienne, jusqu’à l’institution de prestations familiales, de quotients familiaux de fiscalité, etc. ; mesures négatives tendant, au contraire, à limiter ce nombre : propagande anticonceptionnelle, avortements légaux, stérilisation, etc.) ; 

2) problèmes intéressant la qualité de la population (mesures portant sur l’hérédité normale ou pathologique : mesures positives et négatives ; et mesures portant sur le milieu : mesures positives prophylactiques ; ou négatives : lutte contre les fléaux sociaux, alcoolisme, tuberculose, maladies vénériennes) 3 ». 

« Nous devons améliorer l’espèce humaine » 

Notons que ces mesures font référence à une distinction qui est devenue usuelle entre eugénisme positif qui cherche à favoriser la reproduction des plus aptes, et eugénisme négatif qui cherche au contraire à empêcher la multiplication des inaptes. 

Certains eugénistes vont jusqu’à promouvoir, par le biais de méthodes appropriées, une sélection artificielle menant à l’apparition d’une race supérieure, sous couvert « d’améliorer l’espèce humaine ». Cette préoccupation qui pourrait sembler anachronique en ce début de XXIe siècle, quand on connaît la répulsion qu’elle provoque du fait de son emploi par le régime hitlérien, est présente de manière explicite dans de nombreux milieux. C'est ainsi que Robert Edwards, prix Nobel de médecine en 2010, qui a réalisé la première fécondation in vitro, surnommé “père du premier bébé-éprouvette” a écrit : « Nous devons améliorer l’espèce humaine 4 ». 

Afin de distinguer les différents types d’eugénisme qui existent, il convient d’en dresser un panorama historique. 

A suivre 

  • 1Dictionnaire Historique de la Langue Française, Le Robert, 1992, Paris, t. I, p. 747.
  • 2Grand Larousse encyclopédique, Éd. Larousse, 1961, Paris, t. IV, p. 797.
  • 3S. de Lestapis, « Eugénique et Eugénisme » in Catholicisme, Letouzey et Ané, 1956, IV, col. 680.
  • 4Cité par J. Testart, Le désir du gène, François Bourin, 1992, p. 211.