Turquie : assassinat d’un prêtre italien
Le P. Andrea Santoro.
Andrea Santoro, prêtre italien missionnaire de Charles de Foucauld, âgé de 60 ans, a été assassiné, dimanche 5 février 2006, dans l’église Sainte-Marie de la ville de Trébisonde, sur la Mer Noire, après y avoir célébré la messe.
Le 8 février les autorités turques ont arrêté l’auteur présumé du meurtre, un jeune lycéen de 16 ans qui a avoué avoir attendu que le P. Santoro finisse de célébrer la messe, pour le suivre et tirer sur lui à bout portant. Le jeune homme aurait alors lancé le cri : "Allah ou Akbar" (Allah est grand), a confirmé Mgr Giacomo Lucibello, nonce apostolique en Turquie.
Originaire de Priverno, dans le diocèse de Latina, le P. Santoro était né le 7 septembre 1945. Ordonné prêtre le 15 mars 1970, il avait desservi les paroisses romaines de Jésus de Nazareth et des SS. Fabien et Venance. Le P. Santoro était à Trébisonde depuis plus de deux ans, connu et apprécié de beaucoup, surtout pour son engagement social et pour sa constante sollicitude et disponibilité.
"Par cet événement tragique, a déclaré le cardinal Camillo Ruini vicaire du pape pour Rome, s’ajoute un nouveau maillon de la longue chaîne de prêtres romains qui ont versé leur sang pour le Seigneur. Don Andrea avait intensément désiré et demandé avec insistance de pouvoir quitter Rome pour l’Anatolie pour être en cette terre témoin silencieux et priant de Jésus Christ, dans le respect des lois locales. Le diocèse de Rome, même dans cette grande douleur, est fier de lui et remercie le Seigneur pour ce lumineux témoignage dans l’humble certitude qu’en naîtra une nouvelle vie chrétienne".
"Dans l’espoir que son sang devienne semence d’espérance dans la construction d’une fraternité véritable entre les peuples, j’élève de ferventes prières de suffrage pour ce courageux témoin de l’Evangile de la charité. De tout cœur, j’adresse en signe de réconfort la bénédiction apostolique à sa famille, à sa mère âgée si éprouvée et à tous ceux qui en pleurent la disparition violente", a écrit Benoît XVI dans son télégramme de condoléances.
Carlo Azeglio Ciampi, président de la République italienne, a également adressé un message de condoléances à la mère du prêtre assassiné : "La mort tragique de don Andrea, alors qu’il se trouvait en prière dans une église de Turquie, m’a profondément frappé. Son activité pastorale, l’engagement social et civil passionné en terre étrangère, sa profonde confiance dans le dialogue entre les religions et les cultures laisseront une trace indélébile. Son exemple de charité et d’humanité constituent une référence pour tous dans la promotion des valeurs partagées de tolérance, de respect réciproque, du caractère central de la dignité humaine". De même Walter Veltroni, maire de Rome : "C’est un paradoxe, disait-il, que justement les personnes qui tournent leur regard vers la construction de ponts de dialogue soient celles qui succombent. Il ne se trompe pas celui qui cherche le dialogue face à celui qui fait de la politique de la haine sa raison de vivre".
La plupart des journaux italiens ont avancé l’hypothèse que le meurtre était lié aux violentes protestations contre les caricatures danoises. Don Andrea était pourtant un ardent promoteur du dialogue entre chrétiens et musulmans, un "optimiste par nature", soulignent ses paroissiens qui ne comprennent pas son assassinat. Non sans candeur, le nonce Mgr Lucibello a dit, à l’agence italienne Ansa, sa crainte que des motifs religieux soient derrière ce crime « à un moment où le dialogue interreligieux est une priorité absolu. Don Andrea en était justement le témoin et un protagoniste de premier plan ». - Cette mort tragique dissipera-t-elle l’illusion d’un dialogue interreligieux unilatéral où l’un parle tandis que l’autre fait la sourde oreille ? Où l’un discute et concède tandis que l’autre s’affirme sans concession ?